dimanche, janvier 21, 2007

Aventures dans le fore deep

Cette fois, le Destin me conduit dans le «fore deep ballast tank», qui, comme son nom l'indique, est en avant (fore), profond (deep), sert à l'eau de lest (ballast) et est un réservoir (tank). Nous avons une réparation à faire. Il s'agit de la soupape d'aspiration d'eau de mer de la pompe à feu d'urgence, qu'un ingénieur, bien au chaud dans son petit bureau, a jugé pratique de mettre dans le fond d'un réservoir inaccessible.

En tant que Responsable, il m'incombe de superviser la dite réparation, mais attention, c'est le «fitter» qui s'y colle. C'est un gentil garçon aux yeux de velours.

C'est donc flanquée de mon fitter et d’un sous-fifre, munis de l’équipement nécessaire à la conduite de notre mission (lampe de poche, corde, sceau, marteau, pipe wrench, combinaisons jetables et bien sûr le précieux certificat de permis d’entrée dans un compartiment fermé), que nous nous dirigeons vers l’avant du navire.

Le trou d’homme qui ferme l’accès au «fore deep» a été préalablement ouvert et ventilé par un autre sous-fifre. L’atmosphère est testée, 20,9% d’oxygène, c’est bien. J’enfile une combinaison jetable. Mon fitter fait de même. Je protège ensuite mes cheveux d’une guenille propre. Mon fitter juge la précaution inutile. Il est chauve (on peut avoir des yeux de velours et être chauve!). Gants, lumière, outils, tout est prêt. Sous-fifre restera en haut pour monter la garde. Non pas que nous nous attendions à une attaque d’espions armés jusqu’aux dents cherchant à dominer l’univers mais, plus prosaïquement, il s’agit d’une précaution protocolaire dans le cas où nous manquerions d’air, manquerions un échelon puis tomberions dans le fond du réservoir en nous assommant sur les varangues en passant et nous noierions dans l’eau croupie en gisant dans notre sang dans d’atroces souffrances.

C’est parti. J’entreprends prudemment la descente des barreaux de l’échelle, lampe de poche entre les dents. À l’intérieur, il fait noir, froid et humide. Le visage de mon co-équipier se profile là-haut, sur le pont, au travers de l’étroite ouverture d’accès. La journée est belle, le roulis n’est pas trop incommodant. Tant mieux, il ne me vomira pas dessus.

J’atteins le premier palier, 6 mètres plus bas. Il n’y a pas encore trop de boue. Je me demande si je n’ai pas exagéré en entourant mes bottes de travail de sacs de plastique! Le fitter me rejoint, puis je continue vers le fond, que je vois déjà, à la lueur de la lampe, couvert d’eau qui ballote doucement au gré des vagues. Bon. Espérons que les sacs de plastique recouvrant mes bottes ne sont pas percés! Floc! Floc! Trois pouces d’eau, ce n’est pas la mer à boire. Ni même la rivière Hudson. En essayant d’ignorer le filet d’eau glacée qui s’infiltre lentement dans mes chaussettes (finalement un des sacs est percé et la botte qui est dedans aussi), je tente de localiser la soupape d’aspiration d’eau de mer qu’un ingénieur, bien au chaud dans son… (etc).

Ça y est, je la vois, dans la section voisine, à l’endroit où le fond du navire remonte en pente. Je dois encore ramper quelques mètres vers bâbord. Ici, il y a moins d’eau mais une épaisseur de boue s’est installée, dans laquelle les sacs de plastique de mes bottes restent collés.

Pourquoi est-ce que je pense au camp d'été du Collège, justement en ce moment? Je me sens comme en «excursion», ces épiques aventures d’antan, où nous nous mettions dans le trouble tête baissée, avec un enthousiasme fébrile (dans l’espoir d’être nommé «campeur du jour»). Et plus nous mangions de la misère, plus nous étions fiers… Regroupement de sado-masochistes, ces moniteurs avec leurs campeurs? Épreuves rituelles, misère gratuite, souffrances inutiles? Mais, au milieu de tout ça, nous avions du FUN! On nous avait si bien conditionnés à en avoir que nous en avions.

Et c’est sans doute pour ça que, au fond du réservoir, une certaine part de moi-même est ravie de s’être enlisée dans la vase, de devoir ramper d’une varangue à l’autre, d’avoir l’arrière-train mouillé à force de s’asseoir sur les structures froides et couvertes de boue. J’ai du FUN!!! Et je comprends, en un éclair de lucidité, comment les camps de vacances sont une préparation à la Vie, une formation essentielle pour affronter notre Destinée, sourire aux lèvres, en chantant. Comme Michel Sardou…

Je me sens comme dans un camp de vacances, et en plus je suis payée!!! Décidément la vie est bien faite! Mais comme toute bonne chose a une fin, pendant que je cogitais sur le romanesque de notre expédition, mon fitter, moins bien payé que moi, est descendu à son tour et s’est activé le derrière (lire «s'est grouillé le cul») pour procéder à la réparation.

Il faut bien que nous remontions, n’ayant plus rien à faire ici. En plus, c’est déjà l’heure du café du matin.

Il fait vraiment très beau aujourd’hui! Pendant mes vacances, j’aurais tué pour une journée comme celle-là! On prend le pilote vers 15h, on arrive au quai vers 21h. Je dois rester dans la salle des machines tout le temps des manœuvres. En attendant (après avoir fait mon rapport en trois exemplaires), je consacre mon début d'après midi à ne rien faire.

Ah, si je ne suis pas élue «campeuse du jour» après ça!

2 commentaires:

Anonyme a dit...

Campeuse du siècle, ça va-t-y ? :o)

ANDRAINO ADAMS a dit...

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